L’atelier à Monflanquin est vide, seuls quelques outils, un ordinateur, du nécessaire de dessin, de tricot, des vieux collants sont rangés dans un coin. Au loin la guerre gronde ! Alors pour me sentir chez moi, pour travailler, je parcours les chemins, dans et autour de la bastide ; une manière de se déplacer, attentive, à l’écoute. Peu d’humains, mais des oiseaux d’hiver en nombre. J’aperçois un vol de grues cendrées remontant vers le Nord du côté de Montaut, des milans noirs revenant d’Afrique. Des hérons ont élu domicile à proximité d’une réserve d’eau où les Foulques Macroule glissent en criant, méfiantes. Peu à peu l’atelier se remplit de branches d’arbres rapportées de ces promenades. J’habille. Sculptures tendues, percées. Sur Radio 4, la voix de Michel invite à une sortie ornithologique dimanche prochain. Ces rendez-vous naturalistes deviennent un rituel. Mon ouïe s’affute. A St Chaliès je me balade dans les bois avec Marie et ses lamas, elle me raconte comment cet animal a accompagné sa vie. Je ramène du poil dans des sacs d’aliments pour animaux. Les sacs deviennent habits et tentures. Les poils pourraient fabriquer une perruque pour Tony, le bibliothécaire… Je découvre Gavaudun avec la voix de Maud et son chien Ozu, une chanson s’écrit, un duo se crée. J’élargis mon territoire et la vie s’installe à l’atelier. Le réseau grandit, la forêt s’épaissit, se déploie et s’écartèle. D’étranges collages apparaissent, des images se révèlent, l’espace résonne de paroles, de voix, d’ancien chants occitans et de chants d’oiseaux. La promeneuse n’est plus seule.

Sylvie UNGAUER