Hervé COQUERET

Artiste accueilli en résidence de novembre à février 2001.

Scène 58. Extérieur. Une rue. Dans le secteur des docks au nord de la ville. Un peu avant minuit. Des rafales de vent. Le bruit agaçant d’une enseigne déglinguée qui grince : “Garage Fostinelli”.

Scène 59. Intérieur. Garage Fostinelli. Steve ouvre le capot de la voiture et se penche sur le moteur. Richard, adossé au mur du fond, le regarde.

Richard : En physique, on appelle ça une émulsion. La rencontre de deux corps étrangers qui ne peuvent pas se mélanger. En agitant bien fort, ça fusionne, mais ça se sépare ensuite, dés qu’on laisse reposer.
Steve : Tu penses à Patricia ?
Richard : Non. A la voiture.
Steve : Je m’en doutais.

Scène 83. Intérieur. Nuit. Chambre d’hôtel. Le lit défait. Une lampe de chevet est allumée. Une voix : “L’image se refermera et vous ne posséderez rien, vous n’aurez rien acquis, vous vous retrouverez simplement d’avantage dépossédé.”
Scène 102. Intérieur. Jour. Bar Sutherland. Bruits de conversations dans tous les sens. Assise à une table. Patricia attend, nerveuse. Arrive Steve.
Patricia : Il va venir ?
Steve : Il ne va pas tarder.
Patricia : Est-ce qu’il se doute de quelque chose ?
Steve : Tu le connais. Il a un visage de pierre.
Patricia : Il doit savoir quelque chose, sinon il ne viendrait pas.
Steve : Que vas-tu faire?
Patricia : On devrait peut-être la lui rendre.
Steve : Nous ne pouvons pas faire une chose pareille.
Patricia : Où la cacher, alors ?

Scène 103. Extérieur. Jour. Devant le bar Sutherland, la Mercedes noire décrit un demi-cercle sur le terre-plein avant de s’arrêter. Richard coupe le moteur et descend. Regarde autour de lui, puis ouvre la portière arrière gauche et Mr. Stein sort de la voiture dans la lumière grisâtre.

Scène 128. Intérieur. Jour. Bureau de Mr. Stein. Vue imprenable sur la baie. Décor baroque. Propice aux jeux d’illusions. Une voix : “Que s’est-il passé? Pourquoi cette histoire brisée, fragmentaire ? C’est au fond ce que nous tentons de déchiffrer, de comprendre. Et cela tourne à l’ obsession.”

Scène 134. Intérieur. Nuit. Garage Fostinelli.
Fred : Sale histoire. Il faudra signaler la mort de ces deux-là à la police. Pas moyen de faire autrement.
Mr. Stein : Vous pourrez arranger ça, Fred. Je vous paie grassement pour résoudre ce genre de complication.
Fred : Oui, Mr. Stein. Et pour la voiture…?
Mr. Stein : Quelle voiture? Ouvrez les yeux. Regardez. De la lumière. Rien que de la lumière.

Scène 136. L’image se déchire et laisse apparaître cette surface mouvante où les repères se dispersent. Une voix: “Dans cet effet d’effacement, que peut-on alors entendre d’autre que sa propre respiration ?”

Didier ARNAUDET

Hervé COQUERET
Artiste en résidence à Monflanquin
de novembre 2000 à février 2001
Catalogue 16 pages couleurs – 16 x 21 cm
50 photographies – Epuisé
Texte : Didier ARNAUDET