JULIE CHAFFORT

Artiste accueillie en résidence du 15 février au 15 mai 2015.
Vit et travaille à Bordeaux et ailleurs.
Exposition présentée à Pollen du 22 mai au 17 juillet 2015. 

Julie CHAFFORT s’est consacrée à la pratique cinématographique dès la fin de ses études aux Beaux-arts de Bordeaux. 
Son travail, bien qu’orienté vers le cinéma, comprend également une dimension plastique où se mêlent installations et performances; une de ses dernières pièces ‘BANG !’, est une installation monumentale composée d’une trentaine de pianos effondrés les uns sur les autres, scène de désolation spectaculaire, presque burlesque. 
Julie CHAFFORT s’intéresse tout particulièrement à l’immensité et la vacuité des territoires, leur aspect désertique et délaissé mais également leurs rapports à la contemplation et à la méditation. Ses films sont composés de tableaux teintés d’étrangeté, de surréalisme et de scènes absurdes qui reflètent un monde décadent et jubilatoire.

Pollen

 

« De même, pour imaginer, écrire, réaliser un film, je choisis des lieux qui ne donnent aucune indication d’époque, de temporalité, d’ancrage géographique comme de civilisation. Je pars alors d’un décor « naturel » extérieur (champs, forêt, plaine, désert, etc…) qui pourra donner de la puissance aux situations et aux personnages. Ma démarche artistique pourrait se définir comme une réflexion sur la fiction, les possibilités infinies du cinéma quant à jouer librement des composants narratifs et des temporalités. »

Julie CHAFFORT

Dans La barque silencieuse de Julie CHAFFORT, il y a un récit et il y a un récitant. Donc du silence et une voix. Une voix de lecteur. Le lecteur silencieux entend une voix, lisant. La voix de son crâne. Puis, il y a un autre récit. Là où nous circulons, entre les choses : les images, les objets (les accessoires), les paysages (les décors), les effets de miroirs (les représentations), les projections (les ombres), les voix, les mots, les chants, les sons, les animaux et les humains. Les images montent dans le crâne, jusqu’à une sorte de délire. Délire par effets de voisinages, de frictions, de disjonctions. Voyez ce chanteur condamné : à mort ? À être battu ? À être interminablement « agacé » (comme on peut l’être toute la nuit par un moustique) par ce boxeur qui lui tourne autour sans pour autant le cogner, bref, sans pour autant en finir ? Il s’agit d’ailleurs bien de cela : cet homme est condamné à être sans fin menacé par son assaillant : l’enfer se niche dans l’interminable ignorance de la cause de cette convocation au châtiment qui n’en finit pas. Peut-on imaginer torture plus débile ? A peu près aussi subtil qu’arracher les ailes d’une mouche et regarder ce qui se passe ensuite.
Kafka nous avait prévenu : notre châtiment sera grotesque et absurde : l’atermoiement illimité.
Voilà pour l’humour ou, disons mieux : la force comique et son horreur. La tragédie en somme. Ce condamné est bien une représentation infamante. Et le boxeur tortionnaire, le danseur caricaturiste : le burlador.
Le burlesque est une vengeance, une sauvagerie, une danse païenne, une manière de prendre le large.
Et le poétique dans tout ça ? «Notre royaume est celui de l’entre-deux» nous dit Freud.

Christophe BALLANGE

Edition réalisée dans le cadre de la résidence à Pollen – Epuisée –
Plaquette 4 pages – 21 x 29,5 cm
3 photographies